Le rapport Tirole-Blanchard

En mai 2020, le Président de la République avait demandé à 26 économistes comprenant Olivier Blanchard et Jean Tirole de réfléchir en profondeur à la dimension économique de plusieurs défis auxquels notre société se veut confrontée. Pour plus de légitimité, les économistes rassemblés appartiennent à des courants intellectuels et politiques variés.

En juin 2021, les auteurs ont remis leur rapport axé sur les trois principaux défis structurels jugés prioritaires sur le long terme. Le premier étant le changement climatique, le second les inégalités économiques et le dernier le vieillissement démographique. Les préconisations présentes dans le rapport sont susceptibles d’inspirer des réformes futures, notamment en matière de taxation des transmissions et du capital dans un objectif de réduire les inégalités ; mais aussi en matière de retraite, dans un objectif de répondre aux problématiques démographiques.

Nous évoquerons seulement les points pouvant avoir des conséquences patrimoniales.

L’optimisation du mode de taxation

La réduction des inégalités est un des points clef du rapport. Pour y faire face, l’un des principaux leviers pour son effet redistributif est la fiscalité, de manière plus précise l’imposition des transmissions et la taxation des capitaux.

Conscient de l’assentiment, de la population française envers toute hausse le l’impôt, les auteurs ont un seul mot d’ordre « taxer mieux mais non davantage ». L’objectif est le suivant : rétablir de l’équité dans le système actuel sans augmenter les taux actuels mais en traquant toutes les failles et possibilités d’optimisation inhérentes au système fiscal.

La fiscalité des transmissions

Une refonte totale de la fiscalité des transmissions est proposée.

Les bénéficiaires seraient imposés de manière globale et progressive sur l’ensemble des biens qu’ils perçoivent au cours de leur vie (donations et successions sans considération de leur source), et non comme actuellement au titre de chaque don ou bien reçu en héritage selon des règles et en l’application de tarifs qui diffèrent selon la nature ou l’origine des biens.

Les auteurs préconisent de supprimer le mécanisme du rappel fiscal et de limiter au maximum les exonérations. Cette volonté aurait pour conséquence de mettre fin aux pratiques de planification des transmissions permettant alors une optimisation fiscale. Le dispositif Dutreil, pourrait être plafonné afin qu’il puisse aussi bénéficier aux petites et moyennes entreprises, plus enclines à rencontrer des problèmes de trésorerie.

L’imposition deviendrait alors progressive, de manière à ce que les personnes qui reçoivent davantage soient les plus taxés. Les taux préférentiels, fondés sur la relation donateur et donataire ou défunt et héritier pourrait cependant subsistés

Ces préconisations pourraient entrainer des risques d’évasion fiscale, c’est pour cette raison que les auteurs recommandent aux pouvoirs publics de « réaliser de plus amples études pour en estime avec exactitude les coûts et les avantages »

 

Repenser l’exonération des droits de succession

Toujours dans une optique de réduction des inégalités et pour limiter les possibilités d’échapper à l’impôt sur les successions, les auteurs recommandent de réexaminer le régime fiscal préférentiel de l’assurance-vie.

Pour rappel les contrats d’assurance-vie disposent d’une fiscalité avantageuse.

en cas de succession :

  • Pour les versements effectués avant les 70 ans de l’assuré, chaque bénéficiaire peut percevoir jusqu’à 152 500 € sans aucune taxation. Au-delà de ce seuil, les sommes sont imposables au taux fiscal de 20 % (31,25 % au-delà de 700 0000 €). A ce titre, le rapport cite une étude menée par France Stratégie indiquant que les recettes provenant des droits de succession seraient de 20 % plus élevées sans cette exonération.
  • Pour les versements effectués après 70 ans, l’ensemble des bénéficiaires a droit à un abattement global de 30 500 €. Au-delà de ce seuil, les droits de succession classiques s’appliquent.

Ces avantages fiscaux sont cumulables avec l’abattement de 100 000 € prévu pour les successions entre parents et enfants. Ainsi un héritier peut recevoir la somme maximale de 252 500 € en s’affranchissant totalement de l’impôt.

Ces divers abattements et niches fiscales bénéficient aux personnes les plus aisées, favorisant ainsi les inégalités ce qui remet en question leur maintien.

La fiscalité des capitaux

Comme pour les transmissions et l’assurance-vie, les auteurs mettent en avant l’importance d’améliorer l’efficacité de la taxation des revenus et plus particulièrement des capitaux, toujours dans le même objectif : réduire les inégalités.

Plusieurs propositions voient le jour dans le rapport :

  • Amélioration de la taxation des revenus mobiles non pas en augmentant les taux d’imposition mais toujours en évitant les fraudes grâce à l’augmentation des contrôles ciblés au moyen de l’intelligence artificielle, à l’échange automatique de renseignement entre pays et en gommant les distorsions fiscales entre eux ;
  • Ils proposent de réduire l’écart de taxation entre revenus mobiles et revenus du travail afin d’éviter un transfert de bénéfices d’un cadre fiscal à l’autre ;
  • Ils ont la volonté de traquer les niches fiscales inutiles grâce à un processus d’évaluation et de révision des différentes exonérations fiscales. Si certaines d’entre-elles répondent à une logique d’efficacité, d’autres sont plus discutables, comme la réduction d’impôt Pinel, et l’exonération de la plus-value réalisée à l’occasion de la cession de la résidence principale. Exonération qui sera réservée selon les auteurs aux résidences dont la valeur ne dépasse pas un certain montant ;
  • Les auteurs cherchent des pistes sur la taxation des plus-values latentes. Actuellement les plus-values sont imposées lors de leur réalisation et non de leur accumulation, ce qui a pour objectif de permettre aux contribuables de choisir le moment de la taxation et de différer la réalisation de la plus-value à des fins fiscales.

Améliorer la retraite

Second enjeu soulevé par les auteurs du rapport : l’adaptation au vieillissement de la population et plus particulièrement la retraite.

Le projet de réforme des retraites constitue une base de départ, dans la mesure où il prévoit l’instauration d’un système de retraite par points transparent et intelligible, cependant ils émettent tout de même des réserves et proposent des pistes d’améliorations.

C’est notamment le cas de l’ajustement des modalités de calcul des droits à retraite, l’abandon de la notion « d’âge unique de départ à la retraite » à celle de « fenêtre de départ », ou encore la mise en place d’un monde de redistribution accrue.

Un retour vers l’indexation des prestations sur les salaires

Afin d’assurer l’équilibre des régimes de retraites et limiter l’impact des chocs financiers successifs, plusieurs ajustements économiques ont été instaurés, parmi lesquels figure l’indexation des prestations de traite sur les prix, mise ne place au début des années 1990 se substituant à l’indexation sur les salaires auparavant appliquée.

Malgré le fait que cette méthode de revalorisation ait permis de réaliser des économies, elle présent plusieurs inconvénients.

Afin de pallier ces points négatifs, la commission préconise de rompre avec l’indexation sur les prix au profit d’un indexation sur les salaires corrigée d’un facteur d’ajustement démographique garantissant de manière transparente et prévisible l’équilibre du système des retraites.

Une suppression de la valeur d’acquisition du point

Dans un système de retraite par points, les cotisations sont, pour chacun des années de la carrière, converties en points au moyen d’une formule qui consiste :

  • Soit à diviser le montant des cotisations par une valeur d’acquisition ;
  • Soit à attribuer un nombre de points en fonction du ratio rapportant le revenu d’activité individuel au revenu d’activité moyen.

C’est la première formule qui a été retenue par le projet de réforme du système de retraites. Compte tenu de la nécessité d’introduire une relation simple et transparente entre le revenu perçu au cours de la carrière et les points accumulés, la commission recommande, a contrario, de s’affranchir de la valeur d’acquisition du point et propose d’exprimer les points acquis en pourcentage du salaire moyen.

Un travailleur ayant perçu 100 % du salaire moyen pendant une année obtenait 100 points au cours de cette même année, 80 points s’il a perçu 80 % dudit salaire. Un tel mécanisme permettrait d’atteindre avec transparence l’objectif « un euro cotisé ouvre les mêmes droits »

L’instauration d’une fenêtre de départ en lieu et place de l’âge unique du taux plein

Le projet de loi visant à réformer le système des retraites prévoit l’instauration d’un âge pivot fixé à 64 ans. Cet âge pivot permettrait au travailleur ayant accompli une carrière classique et justifiant du nombre de points requis de liquider sa retraite à taux plein.

La fixation d’un âge unique du taux plein est vivement critiquée par la commission ne l’estimant pas adapté aux carrières actuelles, très fluctuantes et parfois instables. Elle préconise donc d’introduire la notion de fenêtre de départ. Celle-ci aurait pour borne inférieur l’âge actuel de 62 ans mais ne contiendrait pas de borne supérieure.

L’objectif est d’inciter les actifs à continuer de travailler tant qu’ils le peuvent. Pour ce faire, il est envisagé d’instaurer des dispositifs incitant les employeurs à prolonger les contrats de travail de leurs salariés aussi longtemps que les 2 parties le souhaitent. Par ailleurs, la commission recommande de renforcer les incitations financières à la prolongation d’activité, tel que le mécanisme de décote et surcote consistant à appliquer un malus s’imputant au montant de la pension de retraite en cas de départ avant l’âge du taux plein, ou un bonus s’ajoutant audit montant en cas de report du départ à la retraite.

La nécessaire mise en place de mécanismes de redistribution accrue

La commission recommande d’introduire un mécanisme d’attribution de points gratuits supplémentaires aux actifs dont le revenu perçu sur l’ensemble de la carrière est inférieur à la moyenne, ou dont la carrière professionnelle a été parsemée de difficultés, afin qu’ils puissent partir plus tôt à la retraite et percevoir des prestations plus élevées.

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